Immersion dans le Nord de l’Alsace : Balades et itinéraires au fil des ried et zones humides

3 octobre 2025

Comprendre les ried et zones humides du nord Alsacien

Les ried – terme issu du vieil allemand « Riet », signifiant « roseau » – désignent ces vastes espaces de prairies humides irrigués par les bras du Rhin et parsemés de mares, de tourbières et de bosquets riverains (Convention Ramsar). Le nord du Bas-Rhin concentre une grande partie de ces écosystèmes remarquables, en particulier dans la région de Seltz, Mothern, Beinheim, Lauterbourg, Roeschwoog, Betschdorf, ou encore Altenstadt.

  • Plus de 12 000 hectares de prairies humides recensés dans le Bas-Rhin à la fin des années 2010 (PNRVN).
  • Certaines zones bénéficient d’un classement Natura 2000, notamment autour du delta de la Sauer et des prairies du Hundsfeld, véritable sanctuaire ornitologique.
  • Les ried abritent plus de 400 espèces végétales, dont près d’un tiers menacé ou protégé en France (DREAL Grand Est).
  • Leur inondation périodique joue un rôle crucial dans l’épuration de l’eau et la prévention des crues du Rhin.

Pourquoi (et comment) explorer ces milieux ?

Marcher dans les ried, c’est vivre l’Alsace autrement : ici, pas de ruelles à colombages, mais une énergie tranquille et une palette de verts, d’ors et d’azurs qui changent au fil des saisons. Les amateurs de faune (martins-pêcheurs, cigognes noires, loutres), les botanistes, les photographes naturalistes ou simplement les curieux y trouvent un terrain d’exploration infini.

  • Accessibilité : La plupart des parcours balisés sont plats, accessibles à tous (prévoyez des bottes ou chaussures imperméables !).
  • Des sentiers pédagogiques jalonnés de panneaux d’interprétation, des observatoires à oiseaux et des aires de pause permettent de savourer l’ambiance unique des lieux.
  • Le cœur de la période d'observation ornithologique se situe entre mars et mai, lors des grandes migrations.

Les parcours incontournables pour s’immerger dans les ried du nord Alsace

1. Le sentier du delta de la Sauer (Seltz – Munchhausen)

  • Distance : 8 km (boucle – balisage anneau rouge, niveau facile à modéré)
  • Point de départ : Parking de la D4 à Munchhausen
  • Temps estimé : 2h30 à 3h, hors pauses obsessionnelles à l’observatoire à oiseaux !

Considéré comme le « poumon vert » du secteur, le delta de la Sauer est un havre pour plus de 200 espèces d’oiseaux, du héron cendré au grand cormoran, sans oublier la pie-grièche écorcheur, rare à ces latitudes. Le chemin serpente entre les prairies hautes, les boisements humides et les bras morts de la Sauer, jusqu’au confluent avec le Rhin.

  • À ne pas manquer : L’observatoire à oiseaux aménagé peu après l’ancienne digue permet d’admirer spatules, mouettes mélanocéphales et, parfois, le vol rasant d’un balbuzard pêcheur en migration.
  • En été, la prairie inondable se couvre de milliers d’iris jaunes, transformant les lieux en tableau impressionniste (source : LPO Alsace).

2. La boucle des marais de Seltz et des gravières de Stattmatten

  • Distance : 6,5 km (boucle – balisage local, niveau facile)
  • Point de départ : Place de la Liberté à Seltz
  • Temps estimé : 2h

Après avoir longé les anciennes gravières, devenues refuges à castors et à libellules, le sentier traverse des marais tourbeux où poussent carex et salicaires. En arrière-plan, les tours de l’église de Seltz rappellent l’histoire de la ville, ancienne cité impériale du Saint-Empire.

  • Été : Les cigognes noires, plus farouches que leurs cousines blanches, profitent des frayères discrètes pour chasser.
  • Astuce locale : Les « mares aux grenouilles » sont un terrain d’écoute exceptionnel en mai pour le concert nocturne des batraciens.

Des panneaux d’interprétation retracent le rôle des gravières dans la reconquête de la biodiversité locale depuis l’arrêt de leur exploitation dans les années 1970 (Strasbourg.eu).

3. Le circuit du Hundsfeld (Beinheim – Salmbach)

  • Distance : 12 km (circuit, balisage losange jaune, niveau intermédiaire)
  • Point de départ : Parking de l’église à Beinheim
  • Temps estimé : 3h30 à 4h

Le Hundsfeld, inscrit comme zone Natura 2000, est traversé par une pluralité de paysages : prairies régulièrement inondées, grèves de gravier, fourrés à cornouiller, bras d’eau peu profonds…

  • En hiver : Refuge pour des milliers de vanneaux huppés et de canards souchets.
  • Observatoires : Deux cabanes postées sur le parcours, idéales pour observer les animaux sans les déranger.

Un passionné local, Jean-Luc, raconte comment la flore s’y transforme : « En juin, la prairie se couvre de vesces, de trèfles et d’orchidées sauvages, notre fierté silencieuse. »

4. Le sentier pédagogique du Woerr – Lauterbourg

  • Distance : 4 km (boucle, itinéraire facile)
  • Point de départ : Parking du Woerr à Lauterbourg

Ce sentier a été spécialement conçu pour le public familial et pour l’accueil scolaire. Il traverse une zone typique d’étangs de gravières et de forêts humides.

  • Panneaux interactifs sur la migration des amphibiens, les réseaux d’irrigation traditionnels, la faune nocturne.
  • Tables d’orientation et plateformes sur pilotis pour observer les castors ou, avec un peu de chance, la loutre d’Europe, revenue depuis peu sur ce secteur (Alsace20.tv).
  • En fin de parcours, aire de pique-nique au bord de l’étang du Woerr, où le reflet des saules tutoie le ciel.

Conseils et bonnes pratiques pour apprécier (et protéger) les ried en balade

  • Respectez les balisages : Certains milieux sensibles sont interdits d’accès hors sentiers pour préserver nidification et reproduction de la faune.
  • Évitez toute cueillette : de nombreuses plantes locales sont protégées, à l’image de la fritillaire pintade ou des orchidées des ried.
  • Pensez à une paire de jumelles et des vêtements adaptés : aux mi-saisons, l’humidité matinale est parfois surprenante…
  • Les chiens, s’ils sont acceptés sur certains circuits, doivent rester tenus en laisse (cf. règlementation du Parc naturel régional des Vosges du Nord).
  • Enfin, laissez-vous le temps : ici, la contemplation et l’écoute des sons—des pouillots véloces au souffle du vent dans les libellules…—font partie intégrante de l’expérience.

Balades guidées et initiatives locales pour (re)découvrir les zones humides

La région regorge d’associations et de professionnels engagés pour faire découvrir ces milieux autrement. Parmi les structures locales, citons :

  • La Maison de la Nature Betschdorf/Munchhausen : animations nature thématiques, sorties en soirée « batraciens et libellules ».
  • La LPO Alsace : organisation régulière de sessions d’observation ornithologique, construction de nichoirs, campagnes de sensibilisation.
  • Les guides-conférenciers du territoire proposent des balades naturalistes centrées sur le patrimoine caché des ried, mêlant géologie locale, légendes de l’eau et témoignages d’anciens.

Un rendez-vous immanquable ? La Fête des Ried, organisée chaque printemps à Seltz ou Beinheim, rassemble producteurs locaux, balades guidées et spectacles éphémères au cœur des prairies humides (visitalsace.com).

Quelques secrets des ried à glaner en chemin

  • Sur les tronçons les plus calmes, on repère parfois des huttes de castors en lisière de frayères. Leur retour en Alsace du Nord depuis les années 1990 est l’un des succès majeurs de la protection locale.
  • Les anciennes « Ichthyonautes » (pêchers professionnels) racontent encore comment, au début du XXe siècle, la plaine s’illuminait de lanternes lors de la pêche nocturne à l’anguille.
  • Dans les marais, les nids de busards des roseaux, camouflés entre les joncs, sont parfois trahis par le vol en rase-motte de la femelle.
  • Certains vieux arbres portent encore les « marques des eaux », témoins gravés des plus grandes crues du Rhin — la dernière crue historique ayant submergé la région date de 1983 (DREAL Alsace).

Invitation à ralentir et à s’émerveiller

Riche de ses ried, de ses bras d’eau discrets et de ses forêts trempées, le nord de l’Alsace offre un visage méconnu de la région, aux antipodes du tumulte touristique. En s’y baladant, on découvre des territoires en symbiose avec leur passé, marqués par la sagesse de l’eau et le dialogue constant entre l’homme, la faune et la flore. Que l’on parte pour une grande boucle naturaliste ou pour une courte promenade, l’essentiel reste d’ouvrir grand ses yeux, ses oreilles… et sa curiosité.

Envie de partager votre parcours ou un petit secret des ried ? N’hésitez pas à laisser vos témoignages ou conseils en commentaire !

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